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29 août 2022 1 29 /08 /août /2022 06:19
Événement  !  (mémoriel par J.C Meyer ; Sans commentaire de Dominique Greiner - Croire-La Croix)
« En 1942, alors que sont persécutées et déportées en France les populations juives, l'archevêque de Toulouse écrit une lettre où il dénonce vigoureusement les violences faites aux Juifs. Mgr Saliège sera parmi les premiers à se manifester publiquement. 80 ans plus tard, scouts israélites et catholiques ainsi que Mgr de Kerimel, Archevêque de Toulouse lisent ensemble cette lettre qui marque l'histoire !    https://youtu.be/DCxZBdUPAO4

Le 23 août 1942, Monseigneur Jules-Géraud Saliège, Archevêque de Toulouse, envoyait une lettre aux curés du diocèse pour qu’elle soit lue le dimanche dans toutes les églises. Dans cette lettre, l’évêque réagissait fortement contre le traitement infligés aux juifs. Cette lettre, sur la personne humaine, écrite il y a maintenant 80 ans, a fait date et continue d’être d’actualité.

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A la fête de l’Assomption de Marie 15 août 2022 , il est demandé par la conférence des évêques de France de lire la lettre du Cardinal Saliège sur la personne humaine.
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Mes très chers Frères,
     Il y a une morale chrétienne, il y a une morale humaine qui impose des devoirs et reconnaît des droits. Ces devoirs et ces droits, tiennent à la nature de l’homme. Ils viennent de Dieu. On peut les violer. Il n’est au pouvoir d’aucun mortel de les supprimer.
    Que des enfants, des femmes, des hommes, des pères et des mères soient traités comme un vil troupeau, que les membres d’une même famille soient séparés les uns des autres et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre temps de voir ce triste spectacle.
Pourquoi le droit d’asile dans nos églises n’existe-t-il plus ?
Pourquoi sommes-nous des vaincus ?
Seigneur ayez pitié de nous.
Notre-Dame, priez pour la France.
      Dans notre diocèse, des scènes d’épouvante ont eu lieu dans les camps de Noé et de Récébédou. Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Les étrangers sont des hommes, les étrangères sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos Frères comme tant d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier.
      France, patrie bien aimée France qui porte dans la conscience de tous tes enfants la tradition du respect de la personne humaine. France chevaleresque et généreuse, je n’en doute pas, tu n’es pas responsable de ces horreurs.
      Recevez mes chers Frères, l’assurance de mon respectueux dévouement.
Jules-Géraud Saliège
Archevêque de Toulouse
23 août 1942
A lire,  Dimanche prochain, sans commentaire

https://toulouse.catholique.fr/70-ans-plus-tard-en-2012-la-Lettre-pastorale-de-Mgr-Saliege-garde-toute-sa

UN ÉVÈNEMENT MÉMORIEL


La lettre pastorale de Monseigneur Saliège du 23 août 1942
Par Jean-Claude Meyer


      Quand la grande rafle du Vel’d’Hiv’ à Paris opérée le 16 juillet 1942 contre les Juifs étrangers, fut connue, le père Henri de Lubac, mandaté par le cardinal Gerlier, vint « se concerter avec l’archevêque de Toulouse en vue d’une intervention commune 1 . » Or un évènement dramatique se déroula près de Toulouse le 8 août 1942 : le transfert en chemin de fer, pour leur déportation en Allemagne, de 330 Juifs d’origine étrangère provenant des camps d’internement du Récébédou et de Noé. Thérèse Dauty, 1’assistante sociale de l’Association catholique d’aide aux étrangers, fut le témoin impuissant de cet effroyable départ :

 

      « Il s’agissait de femmes de tout âge. Sous un soleil brûlant, elles s’acheminaient à pied, du Camp du Récébédou, vers la gare, où les attendaient les wagons de marchandises. Les plus âgées s’efforçaient de ne pas marcher trop lentement et de dissimuler leurs larmes. D’autres, plus jeunes, disaient leur crainte, de se voir séparées d’une mère, d’une parente, âgée ou malade. Et elles ajoutaient comme les malheureux ‘’ réfugiés ‘’ de Noé : ‘’ Qui donc prendra notre défense ? Qui parlera pour nous ? ‘’ C’est ce récit que je fis à Mgr Saliège 2 . »


      Ce témoignage bouleversa Mgr Saliège et l’incita à agir immédiatement. Sa lettre de protestation du 23 août 1942 fut suivie des protestations publiques de neuf autres évêques 3 .
Mgr Théas (Montauban), Mgr Gerlier (Lyon), Mgr Delay (Marseille), Mgr Moussaron (Albi), Mgr Petit de Julleville (Rouen), Mgr Martin (Le Puy), Mgr Pic (Valence), Mgr Choquet (Lourdes). En zone occupée, la protestation de Mgr Vansteenberghe, évêque de Bayonne, entraîna l'interdiction de son Bulletin diocésain par les autorités d’occupation. À Nice, Mgr Rémond protégeait activement le réseau de sauvetage des enfants de Moussa Abadi. Mgr Piguet, évêque de Clermont, fit cacher des Juifs et protéger des prêtres recherchés : il fut arrêté en sa cathédrale le jour de Pentecôte 1944 et transféré au camp de Dachau.


      Maintes fois polycopiée, recopiée à la main, la lettre de Mgr Saliège se répandit comme une traînée de poudre dans tout le Sud-Ouest, dans les journaux protestants, la presse résistante clandestine, et hors des frontières, en Suisse, à la BBC dans les presses britannique et américaine 4 . Par toute la France, elle réveilla les consciences en faveur des Juifs persécutés.


La résistance spirituelle devint plus difficile après l’occupation de la zone libre par l'armée allemande le 11 novembre 1942. Pour la région toulousaine, Jean Estèbe a pu

 

1 Henri de Lubac, Résistance chrétienne à l’antisémitisme. Souvenirs 1940-1944, Paris, éd. Fayard,
1988, p. 167 et p. 176 note 31.
2 Archives diocésaines de Toulouse, /dossier Thérèse Dauty / Récit daté du 18 août 1957.
3 Sylvie Bernay, L’Église de France face à la persécution des Juifs, Paris, CNRS Éditions, 2012, p. 316 et 449-450. – Limore Yagil, Chrétiens et Juifs sous Vichy (1940-1944), Paris, Cerf, 2005, p. 649-651 -
« De nombreux évêques critiquaient la politique raciale des Allemands Le silence de certains ne signifie pas pour autant que l’on n’a pas aidé les Juifs » (Limore Yagil, p. 651).
4 Patrick Cabanel, Mgr Saliège, Une voix contre la déportation des Juifs, éd. Midi-Pyrénéennes, collection Cette Année-Là à Toulouse, Portet-sur -Garonne, 2018, p. 12

 

écrire : « Les gens de toute croyance ont lutté à leur façon contre l’entreprise d’extermination
nazie. Cependant, une mention spéciale doit être faite pour le clergé catholique [...] On n’en
finirait pas de citer tous les établissements catholiques, les simples prêtres et religieuses qui
ont porté secours aux Juifs en danger 5 . » Hélas, ils ne purent empêcher la déportation de deux mille treize Juifs, dont cent sept enfants, qui périrent dans les camps d’extermination 6 .


      Le 9 juin 1944, deux Allemands en uniforme venus arrêter Mgr Saliège, constatant sa
paralysie, le laissèrent, tandis que l’évêque auxiliaire Mgr de Courrèges, absent, échappa à
l’arrestation. Le recteur de l’Institut Catholique, Mgr de Solages, et trois de ses professeurs,
les abbés Carrière, Decahors et Salvat, furent arrêtés et envoyés au camp de Compiègne avec les autres personnalités toulousaines arrêtées le même jour et considérées comme « déportés d'honneur », « détenus pour la sécurité du Reich». Le 14 juillet, eut lieu leur départ pour le camp de déportation de Neuengamme. Lors de ce transfert, Mgr Théas, pareillement arrêté, fut oublié à Compiègne. Mgr de Solages et ses trois professeurs revinrent de déportation à la fin du mois de mai 1945. Revinrent aussi des camps de déportation, l’abbé Lagarde, prêtre de l’Aumônerie catholique des étrangers, et l’abbé Naudin, curé de la paroisse Saint-Jean-Baptiste-des-Sept-Deniers.


       Le 10 juillet 2012, au cours d’une cérémonie solennelle au Musée de la Légion d’Honneur, Avner Shalev, Président de Yad Vashem, déposa une deuxième frappe de la Médaille des Justes gravée au nom du Cardinal Saliège, en déclarant :
« Par sa fameuse lettre pastorale adressée à tous les croyants de son diocèse, affirmant que les Juifs sont nos frères », ainsi que par son soutien aux actions de sauvetage des Juifs, Mgr Saliège incarne bien les valeurs humaines universelles pour lesquelles tous les Justes parmi le Nations ont mis en danger leur vie et celles de leurs proches, pour sauver des êtres humains, sans considération de leur religion ou nationalité »

 

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